UN CLUB, UN HOMME : Pierre Sales, l’emblème de l’autre CO

Publié le 19/03/2018

On dit de Pierre Sales qu’il est au Cazes Olympique (Tarn-et-Garonne) depuis 75 ans! La réalité est légèrement différente (78 ans en fait!) et fait sourire l’intéressé.

 

« Le CO a été fondé en octobre 1940, quelques mois à peine après la débâcle de juin 1940. Le football existait à Cazes-Mondenard depuis plus longtemps, nous avons retrouvé des compte-rendus dans la presse locale faisant état de matches joués par les Espoirs Cazéens dans les années 20. Revenons à 1940. J’avais trois ans, et mon père, l’un des dirigeants fondateurs du CO, m’amenait toujours avec lui, assis sur le capot du moteur dans son bus, c’était lui qui faisait les déplacements de l’équipe… À l’époque, il n’y avait pas de compétitions pour les jeunes, j’ai signé ma première licence en 1952, en cadets, dans un championnat régional, où il y avait très peu d’équipes. C’était l’abbé Laurens, que tout le monde connaît dans le football du Midi, qui était alors curé de Cazes-Mondenard, et qui s’occupait de nous. Je me souviens que, quand on avait un déplacement, il avançait la messe d’une demi-heure ! J’ai joué, défenseur central, demi-centre comme on disait alors, jusqu’à mes 35 ans, en 1972 ».
 

Joueur, secrétaire, président

Quand il raccroche les crampons, Pierre Sales est depuis 1960 secrétaire du CO (à ne pas confondre avec celui de Castres, illustre dans le rugby), et président depuis 1970, un poste qu’il occupera jusqu’en 2010  ! « Ce sont des jeunes, dont le président Alain Sénac, qui ont repris le club depuis cette date, ça marche très, très bien, ils ont su prendre le relais. Moi, je suis vice-président, ou président d’honneur, je ne sais pas exactement ce que je suis », sourit-il.

Ce qui importe, c’est qu’il soit toujours là, et toujours au service des « rouge et blanc »… qui ne l’ont pas toujours été « Avant, on jouait en jaune et bleu. Mais, quand l’abbé Laurens est arrivé au club, il a remarqué que beaucoup d’équipes du Tarn-et-Garonne jouaient avec les mêmes couleurs, et il nous a fait adopter le rouge et blanc ».

Depuis sa naissance, en 1937, ou presque, Pierre Sales n’a donc jamais quitté son pays, ni le CO. Ah, si. « Je suis parti une saison aux Bleuets du Lendou, à Montcuq-Saint Cyprien, dans le Lot, à dix kilomètres de Cazes-Mondenard, où le président faisait, disait-il, ce qu’il voulait. Il m’avait promis de m’éviter l’Algérie, or j’étais marié depuis mes 20 ans, vous comprenez… Et je me suis retrouvé incorporé à Albi, puis Castres, et j’ai fait la guerre d’Algérie. Donc, je suis revenu de suite à Cazes… »

 

Deux Coupes du Midi et une finale perdue

Employé aux Ponts et Chaussées à Lauzerte, jusqu’à sa retraite en 1992, adjoint au maire de Cazes-Mondenard de 1977 à 2008, président du syndicat des eaux depuis sa retraite, Pierre Sales a construit sa vie autour de son village de Cazes-Mondenard, le pays du chasselas de Moissac, et du CO. Un véritable enfant du pays, fidèle à sa terre, à ses origines, à son club, jusqu’à refuser des offres d’embauche dans le privé !

On comprend pourquoi la vitrine de son bureau est si bien garnie, entre les coupes, de toutes les médailles de la FFF et de la Jeunesse et des Sports jusqu’à cet Ordre National du Mérite qu’il s’est vu remettre dernièrement, en septembre 2017 par Jean-Michel Baylet, ministre de l’aménagement du territoire, de la ruralité et des collectivités territoriales dans le gouvernement de Manuel Valls.

En autant de décennies, Pierre Sales a accumulé les souvenirs. Sportivement parlant, le premier est cuisant. « En 1962, j’étais capitaine du CO, nous sommes champions du district, et nous accédons à la Promotion d’Honneur, et là, nous découvrons un autre monde ! Pour notre premier match, nous allons au Stadium de Toulouse, en lever de rideau de TFC-Nantes, je crois, contre les réserves du TFC, et nous prenons 11 à 1, parce que l’arbitre nous a offert un penalty à la fin du match. En face, il y a des pros, Wojciak, Lekkak, Cros, si je me souviens bien, mais surtout, il y a l’éclairage ! Et c’est catastrophique pour nous, car nous n’avons jamais joué en nocturne, ni sur un terrain aussi grand ! »

Ses autres souvenirs, bons ceux-ci, il les aura en tant que président. « Le Cazes Olympique a gagné deux Coupes du Midi, en 1987 à Castelsarrasin contre Cahors, une équipe d’Honneur (3-1), en 2003 à Montauban contre Toulouse Rodéo, alors en Excellence (4-0). Peu d’équipes peuvent se vanter d’avoir mis quatre buts au Rodéo. Et nous avons joué une troisième finale, perdue 2-1 en 1992 contre Luzenac, à Balma. Quand je regarde le palmarès de la Coupe du Midi, il y a peu de petites équipes comme la nôtre ».

 

Un club stable et qui attire

La stabilité est assurément le maître-mot de ce club rural, fierté d’une commune de 5800 hectares pour 1260 habitants dont 200, 250 au village. «Nous avons souvent flirté avec la montée en Honneur, battus notamment deux fois au goal-average par Rodez. Mais nous avons derrière nous vingt saisons de DHR, une division où nous venons de remonter cette saison en tant que meilleur second. Nous n’avons pas les moyens de recruter, mais nous sommes un pôle attractif pour les jeunes, à 30 kilomètres de Cahors et de Montauban, et nous avons une certaine aura : le CO est connu pour son énorme stabilité, toujours dans les championnats de ligue depuis 1962 sauf une saison ! » relève Pierre Sales.

Avec un peu plus de 200 licenciés, dont 170 joueurs, trois équipes seniors, une en U19 (en 2013-14, sous le patronyme de l’Entente, les Cazéens ont gagné la coupe du Midi de la catégorie aux tirs au but, contre Saint-Gaudens, à L’Isle-Jourdain), présent dans toutes les autres catégories avec l’Entente Quercy-Pays de Serres (une vingtaine de communes dans la Communauté dont Lauzerte), le CO n’est pas seulement fier du « pépé du Quercy », Alfred Roques, qui y a joué au football jusqu’à ses 26 ans (!) avant de devenir international de rugby au poste de pilier droit.

Il est le parfait exemple de ces clubs ruraux, où la bonne volonté des dirigeants (qui a permis de construire notamment les tribunes du stade) est le premier carburant. « La municipalité nous aide bien, et le conseil départemental aussi, depuis que nous sommes remontés en DHR. Ici, tous les dirigeants et tous les joueurs paient leur licence, nous avons aussi le soutien d’entreprises, nous organisons quatre lotos, deux ou trois repas et le tournoi du 1er mai, des U6 aux U15. Rien n’est facile, par exemple, l’équipe première et les juniors, font plus de 3000 kilomètres par an, mais nous avons profité de l’Euro 2016 pour acquérir un mini-bus, et la mairie est en train d’en acheter un deuxième ».

La satisfaction du devoir bien accompli accompagne la fierté d’être ancré au coeur de la vie communale, patrimoine bien vivant et mis en relief tous les dix ans depuis 1940, à l’occasion d’un repas où les « rouge et blanc » battent le rappel de tous les anciens, pour des tablées dépassant les 600 couverts ! Quoi de plus beau ?

 

Article extrait du journal numérique de février 2018

Écrit par les membres de la CRIFP. 

Par Alexandra Salendres

Articles les plus lus dans cette catégorie